jeudi 30 mai 2019

balance ton opportunisme

Le cancer fait vendre , c'est bien connu, qui ne s'est pas apitoyé devant le Télévie (Bichon & co), qui n'a pas pleuré devant un gamin avec un bonnet dans un téléfilm pourri de l'après-midi?
Et quand t'es une “star” en Belgique, que tu es surexposé dans les
médias payés avec nos impôts et que tu dis de boire dans une gourde parce que les bouteilles en plastique c’est trop nul , et bien tout le monde achète une gourde (si si, tu vois toi tu es à la 35e depuis l'entrée en maternelle du petit), quand tu fais des clips YouTube pour encourager les jeunes à se bouger pour le climat et bien les jeunes marchent pour le climat. Et, quand tu es une "star" et qu'on te dit "vas voir des petits cancéreux, c’est bankable, ça montre que tu n’es pas là que pour faire de la thune (...) et ben, t'y vas pardi. Et puis tu fais des photos, tu prends un air concerné (tu as certainement dû passer par le conservatoire) sans masque bien sûr pour pas enlever ton beau rouch à lèfff..., tu t’es bien désinfectée avec l’aniosgel? C’est bien fifille, quelle fille cool cette  girl next door d’Angèle , en tout cas t’es engagée toi, t’as un cerveau,  après alzheimer, Me Too,les réseaux sociaux, Balance ton Porc, tiens, si on jouait au Cancer?
En tout cas, le cancer  fait "plus vendre" qu'il y a 6 mois... et qu'on me parle encore de philantrophie. Un artiste doit-il être philanthrope? Pas forcément. Un artiste doit-il être intègre et pas opportuniste? J’en sais rien, il me semble mais je me berce d'illusions et encore faut-il être un Artiste. Il y a 6 mois donc, les agents ou la maison de disque ou je ne sais pas qui se cache derrière les réseaux sociaux de la petite Angèle , certainement pas elle, peut-être qu'elle ne sait pas lire ou alors qu'elle préfère faire des clips VIP en jogging de chez Terre, aller faire bebelle à Cannes ou vendre du merchandising pour gamines de 10 ans (dont du PQ antisexiste, véridique, j’ose espérer qu’elle reverse les bénéfices de son/ses torche cul à une association ...)pour gagner sa vie, bref, il y a 6 mois, LA révélation de la scène musicale belge (mouahahah) n'a pas daigné , après de NOMBREUSES sollicitations gentilles et très polies venant spontanément de gens de tout horizons, venir salir son petit polo Lacoste et abimer ses fausses baskets vintage à 1000 boules pour faire un petit geste ,envoyer un micro message,faire  une petite vidéo (c’est pas comme ça que la nouvelle petite fiancée de la Belgique s’est fait connaître?) pour une petite fille qui était occupée à compter les cheveux qui lui restaient et le nombre de choses de sa vie de fille de 10 ans qu’elle raterait...Mais maintenant, c'est tendance, c’est couvert médiatiquement , elle mouille sa chemise pour une assoc qui travaille avec des gosses qui ont des cancers  « parce que je sais qu’il y a beaucoup d’enfants qui m’écoutent » et forcément quand son sponsor principal, la toute-puissante RTBF relaye massivement l'événement, ça a plus de poids...Profites-en vite d'être sous le feu des projecteurs tant que Papa chante encore tous les dimanches au beau vélo de Ravel pour Vivacité et que maman se partage le marché des voix de pubs avec Ridremont, ça a payé le studio pour ton frère et toi , vous avez eu un prix de gros?... mais bon, après on te proposera peut-être de tourner avec les frères Dardenne donc tu resteras dans le "social"...

Alors ma petite, vu que j'ai presque le double de ton âge, en bonne sorcière que je suis, je ne te souhaite rien de moins que d'avoir un enfant malade, comme ça tu verras ce que ça fait de vivre avec la sensation d'avoir un poignard qui te transperce le coeur jour et nuit et que , seule dans ton lit, tu repenseras avec nostalgie à tes "concerts" où tu sautillais en petite brassière (ou en vareuse des Diables, opportuniste j't'ai dit) devant des pères (de gamines à peine post-pubères) qui ont la trique 🤭 et des mères pathétiques qui connaissent les paroles par coeur et remuent la tête comme devant Chantal Goya... le karma j’te dis ... si je pouvais je te kickerais bien la tronche mais désolée, je suis occupée à me battre contre le cancer , oups... 

mercredi 15 mai 2019

Courage, WTF?

"Courage à vous", "Vous faites preuve de courage , bravo", "Je vous envoie plein de courage","je vous souhaite beaucoup de courage", "Courage Madame", "Courage ma puce, c'est un très mauvais moment à passer"

Mais merde, de quoi courage est-il le nom ?
C’est foncer dans la drache sans parapluie? C’est courir un marathon? C’est oser quitter quelqu’un qui vous fait souffrir? C’est avaler des insectes? C’est afonner des shots de gold strike? C’est sauter en parachute/ a l’élastique ? C’est étudier toutes les nuits pour une session d’examen pour avoir une grande dis ? C’est voyager au bout du monde et manger local sans peur de se choper une tourista ? C’est participer à un concours de cuisine et ne rien lâcher? C'est mettre ses videos de chansons niaises sur Youtube et décider de se "lancer" dans la chanson?

Non , le courage c’est oser entreprendre de GRANDES choses sans craindre la souffrance et la peur, c’est réagir positivement a une situation morale difficile , c’est l’étoffe des héros, une énergie , une force d’âme et dans le cas présent, je fais preuve de tout sauf de courage parce que j’ai peur, parce quand je pleure je suis à genoux, parce que le seul rôle qu’on nous donne à jouer est d’exécuter et suivre à la lettre des recommandations. On le choppe où ce courage? Ça s'apprend? Ça se transmet? et si on était incapable ou plus capable d'en avoir...

Je marche , pour deux, pour trois, pour quatre, pour cent... je me lève je m’habille j’exécute je suis là j’accompagne je coache je motive j’écoute je console je ris je pleure je me fâche -souvent- je tombe nous tombons je me relève je la relève on me relève  je craque je crie je bois je ris j’oublie je recommence.
Alors non, ce n’est pas du courage, on ne se pose pas la question, on est des parents robots , des parents bien drillés, ça roule, tellement que parfois on oublie qu’on n’est que de parents ou juste des parents et qu’on voudrait profiter de la vie avec nos enfants. Rien de bien compliqué, un peu de soleil, changer d’air et de vue, s’asseoir et contempler le paysage , regarder les gens, ne pas être dévisagés sans se soucier de rien. 

Non ce n’est pas du courage c’est un instinct de survie , c’est animal, une maman ourse n’a pas de courage, elle gueule et protège son petit contre tout, moi je n’ai pu protéger un des miens mais je le défends, je l’enveloppe de mon amour immensément grand parce c’est tout ce que j’ai , ce n’est pas du courage, c’est de l’amour, ce n’est pas du pétage de plombs ou des « humeurs », c’est de la colère et un cri de désespoir, ce n’est pas de la force c’est une évidence, il n’y a pas d’autre moyen d’ÊTRE face à ça .
Parfois je n’ai pas ce « courage » alors, j’ai envie de partir seule , de tout plaquer, de les laisser se débrouiller sans moi, de fuir mais là encore, je ne peux pas, même le dire je ne le peux pas, la mère de l’enfant malade NE PEUT PAS dire qu’elle en a sa claque, qu’elle en a plein le cul,  qu’elle veut retrouver une putain de vie sociale, culturelle, amicale, professionnelle parce qu’une mère, ça doit être LA TOUT LE TEMPS et avec un cerveau, une réactivité et une résistance de feu. Quand je pense que ma parentalité me gonflait déjà il y quelques mois et que j’osais m’en plaindre ici. C’est le numéro de la mère qu’on appelle pour les résultats de prise de sang, pour dire quand il faut mettre l’emla ou quand il faudra retourner à l’hôpital pour recommencer la chimio, c’est elle qui arrête de travailler pendant un an, c’est à elle qu’on explique les soins et le régime alimentaire , c’est la place qu’on lui donne sans la consulter parce que c’est une évidence, c’est elle la gardienne du nombre sacré des neutros et globules blancs, le sésame qui ouvre toutes les portes. La charge mentale de la mère d’un enfant malade c’est la charge mentale exposant mille , non que le père en soit exclu mais «  c’est comme ça », lui il ramène le fric, lui il paie les factures, elle , elle éponge le vomi. Et puis, c’est toujours la mère qui est sollicitée, comme si expulser 3kg500 avec episio après 9 mois et 10 jours , 8h de travail et autres joyeusetés c’était juste pas suffisant.

tee-shirt Héroïnes @http://www.julietteponey.com

Si j’avais du courage je prendrai ça avec philosophie : tout est bon, les résultats sont bons, tout est OK, mais on va encore t’envoyer 6 bons gros mois de chimio dans la gueule pour être certains que ça ne reviendra pas ... oui c’est pour son bien c’est pour un mieux, et puis c’est quoi un an dans une vie? Et bien, si j’avais du courage, je t’/ leur expliquerais ce que c’est de priver une gosse de 11 ans d’école, de danse, de théâtre, de louvettes, de sorties ,de bouffe, de liberté, de vie sociale pour qu’elle passe 12h par jour en huis clos avec mère courage sur la mutuelle qui pète légèrement des plombs ou ds journées entières à se faire rincer à coup de Round Up dans les veines mais bon ... je vais pas te plomber ta journée ensoleillée, t’auras plus le courage de me lire après ...

vendredi 10 mai 2019

c'est ta fête

Lentement la mère se consume , d’abord un feu violent et destructeur l’a ravagée ,transformant lentement ses organes en morceaux de charbon, bois calciné noir et dur, fragile et en désordre... et puis ce qu’il restait de tendresse, de cœur, de patience disparaît peu à peu, c’est une colère noire qui remplace ce qui faisait d’elle une mère, LA mère. Parce qu’en fin de compte, c’est quoi, être une  mère quand l’enfant qu’on a porté , soigné, allaité, choyé, entouré d’amour, d’attention, d’affection, c’est quoi être une mère quand cet enfant souffre, quand la maladie est en lui et qu’on n’en est pas responsable , quand on ne peut plus jouer ce rôle de super héroïne qui guérit, console, rassure parce que tout est hors de contrôle , parce que les jours sont des semaines et les mois des années, que tout est si long, si incontrôlable...être la mère de l’enfant malade et n’être plus QUE ça , ne plus exister dans le monde professionnel, n’avoir aucun droit et aucun statut, sauf celui d’accepter ce qu’on vous propose en disant merci, ne pas avoir sa place dans le monde médical, ne pas être pris en charge pour affronter ce choc qui continue à résonner durant des mois, car chaque nouvelle est un coup de pied, un coup de poing dans le ventre, au jour le jour devoir être là, mais sans avoir le droit de décider quoi que ce soit, être sollicitée pour l’hygiène et l’alimentation, mais n’avoir aucun droit au chapitre, être une potiche, esclave ,pleureuse et devoir garder sa peine qui ronge , consume. Quelle place, quel rôle pour cette mère qui a donné cette vie -de merde- a son enfant?
Des mois d’enfermement, des mois de contrôle , passés et à venir, « vous n’avez droit à rien Madame », juste à chiquer votre misère et attendre que ça passe, et attendre que ça se passe, après vous reviendrez, tout recommencera, vous y aurez laissé tant de plumes que le retour à la réalité sera rude, mais vous n’aurez pas le choix, il faudra se remettre debout, avancer, quand il n’y aura plus d’enfant à soigner, il faudra reprendre votre place dans cette société qui vous en a exclue, et vous taire en essayant de tenir debout, ne pas flancher, avancer, vaciller, recommencer… 
Et cette colère et cette peine, tantôt assourdissantes tantôt silencieuses, qui ne quittent ni les nuits, ni les jours, qui vous empêchent de dormir , de sortir, de marcher dans la ville, de parler , de respirer, de manger…c’est ça être une mère ?
Et votre enfant qui se résume à un protocole suivi religieusement par des médecins qui ne savent parfois plus qui se cache derrière un statut CNS ou à quand correspond le jour 1 du 5ebloc…être une mère et se taire, dire oui et merci parce qu’on n’est pas légitime pour demander des explications auxquelles il n’y a aucun e réponse,  parce qu’on n’a pas droit au chapitre , parce que l’humain dans tout ça, il n’existe plus, à la chaîne, maternité à la chaîne, cancer à la chaîne, tristesse à la chaîne… Être mère et se taire, continuer, jour après jour, devoir être là tout le temps, partout, avoir son calendrier décidé par des gens qui font des réunions auxquelles on n’est pas convié et décident de tout, être mère et se taire, ne pas dire qu’on n’en peut plus, qu’on est dévasté, qu’on est littéralement mort de fatigue, qu’on ne tiendra pas encore 6 mois à ce rythme , qu’on a aussi un autre enfant qui a besoin d’une mère entière.

Être mère et ne plus vouloir être rien, continuer à remplir ce rôle qu’on a voulu jouer il y a bientôt onze ans parce que c’est le seul qu’on ne peut pas abandonner… prendre conscience que la vie te fait ta fête en grande pompe…