Alors, j’ai lu des choses sur des forums où des gens disent « mais enfin, même si vous trouvez cet arbre superbe et majestueux, c’est égoiste de le garder dans un pot sur une terrasse de banlieue, donnez le à quelqu’un qui a un jardin, là il pourra s’y épanouir » et j’avais envie de répondre à cette charmante personne : de quel droit décidez -vous de ce que j’ai le droit de faire pousser sur ma terrasse ? Après avoir réglementé nos sorties, notre vie sociale et culturelle, nos tenues, nos propos, nos libertés, on va aussi se mêler de ce qu’on a le droit de faire pousser ou pas ? Va le dire aussi au débile qui a mis un palmier à Kinkempois… Cet arbre, que je vais donc tenter d’apprivoiser et d’élever du mieux que je le peux, c’est un peu moi, on lui prête des tas de vertus, la force, la résistance (la résilience) mais il est là, planté dans un pot, un peu gauche, très maladroit, il ne sera jamais majestueux comme ceux que vous croisez dans les très beaux jardins ou les parcs. Il restera bridé, j’espère qu’il fera le job d’ornementation dans son gros pot.
lundi 10 mai 2021
le ginkgo
Alors, j’ai lu des choses sur des forums où des gens disent « mais enfin, même si vous trouvez cet arbre superbe et majestueux, c’est égoiste de le garder dans un pot sur une terrasse de banlieue, donnez le à quelqu’un qui a un jardin, là il pourra s’y épanouir » et j’avais envie de répondre à cette charmante personne : de quel droit décidez -vous de ce que j’ai le droit de faire pousser sur ma terrasse ? Après avoir réglementé nos sorties, notre vie sociale et culturelle, nos tenues, nos propos, nos libertés, on va aussi se mêler de ce qu’on a le droit de faire pousser ou pas ? Va le dire aussi au débile qui a mis un palmier à Kinkempois… Cet arbre, que je vais donc tenter d’apprivoiser et d’élever du mieux que je le peux, c’est un peu moi, on lui prête des tas de vertus, la force, la résistance (la résilience) mais il est là, planté dans un pot, un peu gauche, très maladroit, il ne sera jamais majestueux comme ceux que vous croisez dans les très beaux jardins ou les parcs. Il restera bridé, j’espère qu’il fera le job d’ornementation dans son gros pot.
samedi 8 mai 2021
Mater Dolorosa
Ahhh, la revoilà celle qui se plaint tout le temps? elle nous ressort sa petite complainte de burn-out parental pour la fête des mères..
Oui, oui c'est moi, toujours en pleine introspection de ma personnalité obscure et auto-destructrice. Je commence, à force de séances chez Mme G. aka LA magicienne et de lectures, à comprendre que "la blessure du rejet" serait une des principales causes de mon handicap social et de mon incapacité à interagir avec les autres dans la non-violence.
Dans tous les cas, en parlant de fête des mères, il y a 13 ans, je n’avais pas signé pour ça, il y a deux ans j’étais au fond du trou, il y a un an je pleurais et j'essayais de faire de l’humour sur le confinement. Aujourd’hui je n’ai plus envie de rire en fait...
Je comprends les filles qui écrivent des bouquins « pourquoi je ne veux pas d’enfant » et qui ont même des comptes Instagram du même nom. Demain, c’est cette sacro-sainte fête des mères, tu vois celle où tu faisais et où tu as reçu un collier de nouilles, un superbe bricolage plein de paillettes (qui finit par prendre la poussière dans un carton mais INTERDICTION formelle de le jeter). Cette fête qui, quand tu es mère (donc linguistiquement parlant, c’est aussi TA journée) et que tu pourrais pépouze finir de regarder les Sopranos en streaming sur ton ordi avec un 5e café/ faudrait d’ailleurs arrêter le café/ et les séries en streaming) et bien, vu que tu es aussi FILLE de, tu vas la passer à courir les chapelles chez TA mère et chez la mère de ton mec (alors que c’est TA journée donc), manquerait plus qu’il faille en plus aller sur les tombes des grands-mères.Cette fête c'est celle où on célèbre cette bonne vieille poule pondeuse/ vache à lait/chèvre solide des Abruzzes qui donne la vie mais le reste de l'année c'est charge mentale exposant 10000. C'est cette fête que tu fêtes même quand t'as pas d'enfant(s) pour la/les raisons que tu as choisi.es parce que tu es la fille ou fils de quelqu'une, cette fête que tu fêtes quand tes enfants ne sont plus là (parce que même s'ils ne sont plus là physiquement, tu es toujours une mère) ou quand ta mère n'est plus là (tu y penses quand même) mais on va taper un bon gros coup là où ça fait mal pour vendre des brunchs à 25 balles, des chocolats dégueu et moches et d'immondes cartes "je t'aime maman". Soit, c’est comme ça, on te dira : « Mais tu as bien de la chance toi d’avoir ta mère, et tes parents en fait ». Oui oui, j’ai cette chance immense d’avoir mes parents. Même s'il y en a un des deux, entre mort ou ça, je vois pas trop la différence. Je l'ai trouvé hier avec mon fils dans le Catalogue de parents pour les enfants qui veulent en changer de Claude Ponti, il s'appelle l'Absent (si tu ne connais pas ce livre, trouve-le!), j'aurais préféré Les Aventuriers mais bon, j'ai déjà une Maria-Rosa et un Francis et j'ai eu l'immense honneur d'avoir une Rosa...
Enfin, voilà, c’est la marketing "festa des Madre", mais soyons clairs, à la maison, c’est tous les jours ma fête et c’est comme le 8 mars, pas besoin d’un jour pour me remercier:
- d’avoir passé 18 mois comme une baleine, 20h en travail pour finir avec deux épisios et de belles cicactrices, un vagin distendu, un utérus enflammé, un endomètre qui s’étale partout, des organes en compote, 2x 6 mois d’allaitement exclusif,
- 2 ans de cancer+ 3 ans de suivi rapproché (en cours),
- 20 ans de suivi psy,
- un doctorat en « oui oui merci» grâce à tous les conseils qu’on m’a donnés sur le sommeil, l’éducation, l’allaitement, les repas, la crèche, l’école primaire, l’école secondaire, le cancer pédiatrique, la chimio, les « moi aussi je connais quelqu’un qui », les « oui mais maintenant ça va hein ? regarde elle a des cheveux », les « oooh, la chaise roulante c’est pas la mort hein», les « oooh, un seul ovaire c’est pas la mort », les « ooooh il y a plus grave », les « et, comment allez vous ? », les « ooooh les antidépresseurs c’est pas grave, hein, c’est pour ta chimie », les « calme-toi ».
mardi 2 mars 2021
Vous en reprendrez bien un peu?
De confinement ? De
culpabilité judéo -chrétienne ? De prise de sang et d’après-midi aux
urgences, d’attente de résultats ? D’envie de gerber.
Le poète français Frank Ribery a dit "j’espère que la routourne va tourner" moi aussi, mais je me demande bien quand…
Je ne vais ici énoncer, pour la plupart,
que des banalités mais il me semble nécessaire de les consigner quelque part,
au cas où un jour ou aurait oublié , on sait jamais , la résilience existe, on
nous assez bassiné les oreilles avec ça.
Donc, aujourd’hui 2 mars 2021, confinement jourjesaispluscombienmaistrop, nous sommes toujours limités à un contact social rapproché (aka lesansmasque-que-vous-pouvez-voir-mais-qui-ne-peut-pas-voir-le-reste-de-votre-famille-sinon-lui-ça-lui-fait-4-contacts-rapprochés-d’un-coup), ça va faire un an qu’on patauge dans ce gros vomi de covid et on sature, un an qu’on ne sait plus travailler, vivre, sortir normalement. On vaccine des gens mais on ne sait pas trop qui, on ne comprend plus les règles, d’ailleurs ça va faire 6 mois qu’on nous enfume sans trop de perspective « tenez bon » et "arrêtez de pleurnicher" je peux plus entendre ces injonctions à garder le cap, j’ai accouché 2 fois, donc tenir bon, je sais faire, merci et là je ne je vois plus pourquoi. Même que c’est interdit d’aller s’asseoir avec des potes dans un parc PUBLIC pour boire des coups (vu qu’on ne peut plus le faire chez soi en théorie bien sûr). Bref, on porte atteinte à nos libertés, on a peur de faire un pet de travers sous peine de se taper une amende et on panique quand on est sur la route à 22h, ah non ça a changé, depuis hier , on peut rentrer à minuit (de nulle part vu que tout est fermé ou on revient de chez des poteschezquionestalléssemurger-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le nom-ni-donner-ladresse). On est tellement lessivés et en manque de VIE qu’on laisse nos gosses devant les consoles et on n’a pas toujours le courage de planquer ces dites consoles le soir en allant dormir pour qu’ils ne s’éveillent pas pour jouer à Minecraft à 6h du mat un dimanche, on a même recommencé à acheter des goûters tout faits parce que flemme de ranger et nettoyer la cuisine 1h pour un cake et une boite de biscuits maison qui auront disparu dans 2 jours et qu’il faudra recommencer entre 2h de cours à distance parce que qu’on n’est pas jugé comme « cours essentiel qui doit être donné en présentiel » , la maitrise de la langue orale parait que ça s’enseigne super bien sur Teams avec 3 caméras valeureusement allumées sur 20 et 10 micros pourris, je vous jure, on travaille surtout le non-verbal et moi je m’agite sur ma chaise du bureau comme un pantin articulé ou une marionnette liégeoise durant 2h 3x par jour, en faisant des mimes et en imitant des timbres de voix, on S’ECLATE !
Alors pour couronner le tout, il ne faut pas oublier qu’à Kinkempois Beach, une fille de 12 ans et ½ se remet lentement d’un cancer qui lui a littéralement bouffé 2 ans de sa vie (et les os). Et quand cette gamine a de la fièvre et est faiblarde c’est panique à bord, Die Hard 2021, flashback du jour le plus horrible de ta vie, stress, médecin traitant, défenses immunitaires basses, coup de fil à l’oncologue, retour aux urgences, 3 infirmières, un bracelet d’abattoir en plastique au cas où on oublierait comment elle s’appelle, 3 médecins qui se succèdent, des malheureux assistants habillés comme pour aller sur la lune qui doivent en référer à leur supérieurs et qui ne comprennent rien à tout l’historique que tu leur déballes avec précision comme un robot « euh plus lentement et attendez je vais aller en parler à mon collègue » (et puis Madame, avec le casque je n‘entends rien en fait et quand je parle ça résonne mais on ne m’entend pas dit-elle après avoir demandé 4x « EST-CE QUE CA BRULE QUAND TU FAIS PIPI ? »)
et après, classique : à l'accueil "vous venez faire une prise de sang mais pourquoi aux urgences? peut-être connasse parce qu'elle est en rémission d'un cancer depuis 6 mois mais qu'elle a eu de la forte fièvre et qu'elle ne va pas bien", cathéter (parce que par principe, on refuse de piquer dans le PAC , trop de mauvais souvenirs), "et la chaise roulante c'est parce qu'elle est faible? " (non on trouve que c'est design), prise de sang, radio des poumons, test covid et tout le tralala, les bruits assourdissants qu'on n'avait pas oubliés : le tensiomètre, les bips intempestifs, les bébés qui hurlent dans la chambre à côté, les portes battantes automatiques qui s’ouvrent et puis il y a les odeurs aussi : caoutchouc du garot, du masque en papier de l’hôpital, du gel hydroalcoolique de l’hôpital, de ta transpi parce pas de bol, c’est le jour où t’as décidé de mettre ton déo bio à 10 balles inefficace en cas d’urgence sudatoire, la mémoire de la peau : toucher le matelas recouvert de plastique, la blouse rèche. Et puis l’attente, interminable, les minutes sont des heures , ½ heures en parait 3…l’impatience, les « je vais leur pêter leur grosse gueule s’ils se pointent pas dans les 10 minutes ». Sans oublier les sms « on a toujours vu personne », « on attend de faire la prise de sang », « on attend le médecin », « on attend les résultats », cette gerbe au fond de ta gorge qui n’attend qu’on mot pour sortir. Et, pour couronner le tout, il y a ces questions qui ne se posaient pas avant : et si je rechute ? et si je dois rester ? on fait quoi ? et bien, on retrousse nos putains de manches, on prépare un sac, on fume 3 clopes, on affonne un truc bien alcoolisé, et on attaque, on repart, comme si c’ était la première fois. Bien entendu, ce sera un happy end ce 2 mars, pas de souci, juste un microbe, un virus (pas celui à la mode), une capacité moindre à se remettre après avoir eu ses défenses mises à rude épreuve. Une journée hors du temps, il y en aura peut-être d’autres, et puis on apprendra à vivre avec ça, ça ne sera jamais comme avant, ça ne sera jamais plus une vie « normale », les médecins ont compris, nous rassurent, ils savent, parce qu’eux aussi ils ont eu chaud mais ils en ont vu d’autres. On se dit que personne ne peut se mettre à notre place, on dit "tu peux vraiment pas comprendre", au retour on pleure, on chante tata yoyo , on parle, on a une vraie logorrhée et on s’écroule de fatigue parce demain, la vie reprend, on en a presque oublié notre vie confinée -de merde- avec notre boulot -de merde dans sa configuration actuelle- mais c’est une petite décharge qui nous force à rester éveillés, en position de combat, Rasengan (oui j’ai dû vérifier l’orthographe) comme dirait mon fils…
vendredi 15 janvier 2021
Joyeux confiversaire!
J’aime toujours aussi peu le sport,
J’en ai marre du confinement ,
J’ai une activité cérébrale beaucoup trop confuse et on n’a pas encore
pu poser de diagnostic : lunatique ? borderline ? bipolaire ?
cyclothymique ? maniacodépressive ?
Mon fils écoute Jul , je dois avoir foiré un
truc dans son éducation,
Ça fait 20 que je suis en thérapie,
Je pleure le matin de mon anniversaire depuis que ma grand-mère n’est
plus là pour être la première à me le souhaiter à 6h30 du mat., en fait hier j’ai pleuré de 7h30 à 17h30…
Je me souviens qu’il y a deux ans Ava avait chauffé la nuit et qu’on
était à l’hopital pour mon anniversaire, quelle fête d’enfer c'était hahaha,
J’ai toujours des règles aussi douloureuses qu’à 11 ans, et j’en ai
marre de souffrir parce que je suis une femme, d'ailleurs mon corps m'a donné mes règles hier pour mon anniversaire,
J’en ai marre de porter des soutifs à baleine
et d’ailleurs même que parfois je vais à l’épicerie et j’en mets pas , voilà
c’est dit…
On a vaincu un cancer à plein,
L’an dernier on était 50 dans ma cuisine et
certains allumaient le gaz avec leur cul,
Je n’oublie pas que mon père nous a abandonnées quand j’avais 11 ans,
Je n’aime toujours pas mon corps,
Putain, j’en ai marre de ce confinement de
merde,
Je porte toujours des culottes Petit Bateau,
J’ai envie de dépiauter le fauteuil roulant
pièce par pièce et d’écraser tout avec une grosse masse en criant, d’ailleurs
je crois que je ferai ça un jour,
Je suis heureuse que mes enfants grandissent
dans un monde où EN VRAC les questions de genre, de sexe, de féminités et
masculinités, de consentement, de racisme, de religion, de handicap, de différence, de décolonisation sont
interrogées sans cesse,
Je me souviens du comportement et de ce que j’ai vécu avec le mec
brièvement fréquenté quand j’ai fêté mes 20 ans qu’on serait en droit d’appeler
violeur aujourd’hui,
Quand je me maquille, ça tient plus sur ma
tronche et sans maquillage je peux être figurante dans Walking Dead,
D’ailleurs parfois, même que je sors sans
maquillage , rien du tout, et je me dis, avec mon masque toute façon… on voit
rien,
Et d’ailleurs je croyais même pas qu’après la
chambre stérile on porterait un jour tous de vrais masques dans la vraie vie,
Et d’ailleurs aussi, j’aurais jamais cru que j’ACHETERAIS des masques,
Je vomis toujours quand je bois (trop) sans
manger,
Il y a deux ans, je crois que j’aurais pu tuer
des gens à mains nues,
Je sens que ma peau mute en peau de vieille,
elle a perdu de son élasticité et j’ai des taches de vieille,
De 11 à 26 ans, je crois que j’étais morte à l’intérieur, et puis le dragon est sorti…
J’ai souvent besoin de répéter 10 x la même
chose quand je suis énervée,
Je pourrais être la mère de mes élèves,
J’ai besoin de beaucoup de béquilles chimiques,
Pour mon 2e accouchement, que le
médecin a provoqué 2X (pour que ça s’accorde avec son planning), on m’a laissé sortir de l’hopital un jour
ferié avec 40,5 de fièvre et j’ai cru que j’allais crever, ça s’appelle comment
ça ?
Je hais ce corps,
Je n’ai pas arrêté de fumer,
J’ai eu des problèmes avec un flic et j'ai dû prendre une avocate,
Je pense réellement que j’aurais pu vivre à
Berlin,
Je fais des expérimentations capillaires depuis
23 ans ,
Je me suis déjà pris des gifles et j’ai été bousculée, et c’était pas par ma mère, aujourd’hui ça aussi, ça a un nom,
J’ai des tatouages que je ne regretterai pas
quand je serai toute fripée,
Dans ma tête je pense que je suis restée coincée
à 26 ans ,
Je crois que j’ai épuisé mon capital soleil,
Je me demande comment je vais donner mon cours
de Maitrise de la Langue Orale en vidéo avec des caméras et des micros qui
foirent toutes les 10 minutes, hahaha, on va encore bien rire, quelle poilade
cet enseignement distanciel dites donc ! (dire qu’il y en a qui aiment
ça),
Mon filleul est officiellement plus grand que
moi,
J’en ai marre du confinement ,
J’ai pardonné à Angèle,
Je me mets souvent en PLS dans mon lit ou mon
divan quand je suis seule et je ne bouge pas pendant des heures,
Quand j’ai envie d’un truc, je me l’achète, je
ne supporte pas le frustration, je ne l’ai que trop expérimentée durant mon
adolescence,
Je regarde « Ici tout commence » sur Auvio en plus,
Il paraît qu’un jour je me ferai casser la
gueule à force de faire des doigts d’honneur,
Je ne suis pas économe,
Je déteste toujours autant me voir en photo ou
dans un miroir,
J’ai vachement envie de partir en vacances au
SOLEIL,
Je n’arrêterai jamais de gueuler et de me
mettre en colère,
J’en ai marre du confinement,
Parfois ce sont mes enfants qui me consolent
quand je pleure,
J’aime toujours autant les frites,
J’aimerai vraiment bien hériter d’un gros
paquet de fric plutôt que de dettes,
Je n’ai toujours pas fait la paix avec moi,
Rien ne m'apaise plus que la mer quelle que soit la saison ou la situation géographique,
J’ai plus d’amis qu’à 20 ans,
Ma générosité me perdra,
Je rêve d'être l'héroine de"Mon année de repos et de détente" (d'Ottessa Moshfegh)
J’en peux plus du confinement,
Je pense sincèrement que je n’aurai jamais mon
permis (désolée),
Mon mec m’appelle souvent Mélenchon ou Bacri ,
J’en ai souvent marre des choses, d’ailleurs je
crois que « j’en ai marre » est la phrase que je dis le plus de toute
la vie,
Je me demande toujours si je suis
« aimable » (au sens « digne d’être aimée » et pas
« vous êtes bien aimable »),
J’en ai marre qu’on nous prenne pour des
quiches ,
Non, je n'aime pas TOUT LE MONDE,
Il y a des gens, je les supporte vraiment pas …mais
vraiment pas, c’est épidermique,
J’achète toujours plein de fringues que je n’ai
plus l’occasion de porter vu que je ne sors plus de chez moi pour bosser ,
D’ailleurs, ça fait 5 jours que je ne suis pas
sortie de chez moi,
Je crois que les gens ne me connaissent pas vraiment…même
si je me livre beaucoup ici…
photo @thomas lelu instagram |
lundi 4 janvier 2021
Bonne apnée
Je suis assise à mon bureau depuis 1h30, en plein questionnement métaphysique : dois-je me refaire un 3e café ? dois-je aller me remettre au lit avec un somnifère et une série ? dois-je corriger mes 240 examens réalisés sur ordinateur ? dois-je aller m’enfiler le dernier quart de galette des rois ? dois-je aller faire des raviolis maison ?
Ma loyauté vis-à-vis de mon mec et mes
enfants qui sont partis dans le froid et les larmes ce matin à 7h45 voudrait
que je me mette au travail, solidarité oblige. Ma paresse naturelle voudrait
que j’aille dormir et ma propension naturelle et innée à vouloir être une mère
parfaite voudrait que je prépare le souper (oui déjà) et que je repasse les 3
tonnes de linge planqué dans ma chambre. Au lieu de ça, je préfère ne rien
faire et culpabiliser, être devant mon ordi et avoir l’impression de travailler
parce que j’ai écrit 3 mails, regardé et compté les examens à corriger et ouvert
2 fois mon syllabus du Q2 à retravailler…
En fait, si j’avais pu aller travailler, en gros aller faire passer ou surveiller des examens dans une vraie école et voir des vrais gens, j’aurais bu un café dégueu à la machine en me plaignant sur le fait que les congés d’hiver n’en sont pas vraiment, que j’ai trop bouffé et trop bu, trop procrastiné…Et puis j’aurais répondu aux 250 questions d’étudiants après les avoir installés avec 2 bancs d’écart, distribué des questionnaires A B C pour éviter la triche. Après je me serais baladée dans la classe en les observant d’un œil de lynx et puis après 1h30 en m’affalant sur ma chaise, j'aurais soupiré en espérant qu’ils FINISSENT enfin(c'est quand même pas possible, en 45 min ça devrait être terminé, c'est toujours ceux qui ne viennent pas au cours qui trainent à l'exam gnagnagna). Enfin, j'aurais menacé les deux derniers de leur arracher leur copie après 2h15. Puis je serais rentrée à pied pour ELIMINER et me DEFOULER de cette matinée éreintante et je me serais affalée dans le fauteuil avec un reste de choucroute devant les Feux de l’amour… J’aurais essayé d’effacer les plis du plaid imprimés sur ma joue à 15h50 et rebu un café pour me donner une contenance avant que tout le monde rentre et puis voilà… ça aurait été une journée de rentrée normale…
Au lieu de ça, je suis assise à mon bureau depuis 3 mois, à essayer de
me dire que « ça va passer », « on retournera à l’école »… Mes
yeux brulent devant l’écran, mon dos est en compote, je ne supporte plus de me voir,
moi et ma gueule dans la vignette en visio, qui parle, s’agite, fait des gestes, ça me ronge de m'inquiéter que mes étudiants puissent suivre leur cours ou faire un examen sur un smartphone, j'en peux plus d'essayer de rendre les choses vivantes face à des visages figés ou des initiales,
sans un bruit. J’ai envie de gueuler, de leur dire « arrêtez de discuter »
ou « lachez votre téléphone ». J’ai envie de me prendre les pieds
dans le seau, de rire parce que j’ai dit une connerie, de m’agiter d’un bout à
l’autre de la classe et de perdre ma voix, j’ai envie de rééxpliquer pour la 10e
fois une règle d’orthographe grammaticale stupide, de râler avec mes collègues
à midi comme des profs normaux… j'ai envie de retrouver un sens à ce que je fais. Et sans parler du fait que, comme tout le monde,
j’ai envie de voir autre chose que le
mur de mon bureau ou le spectacle dépressif de la pluie qui tombe sur une terrasse/jardin en désolation et
sur le pont de Cointe… J’ai envie de serrer des gens dans mes bras, de faire la
file pour aller aux toilettes à une soirée, de pousser des coudes pour accéder
au bar, de boire de la bière dégeu dans des verres cautionnés le cul dans l’herbe humide à un festival, de regretter pendant une semaine d'être allée dormir à 4h30 du mat, d'avoir cet horrible son dans les oreilles à cause de la sono de merde, d’aller m’entasser
avec d’autres sur une terrasse pseudo-chauffée pour boire des bouteilles de
vin, j’ai envie de danser sur de la bonne musique, d’écouter de la musique en vrai,
de faire une fête de fous pour fêter la fin officielle du traitement de cancerdemerde, j'ai envie d'aller au théatre, en fait j'ai juste envie d'aller m’asseoir dans une salle avec des gens et attendre que la lumière s'éteigne, j'ai envie d’aller voir un film pour gosses au Parc (et peut-être même de m'endormir), j’ai envie de bien me saper pour
sortir, d’aller bouffer des grillades au resto grec, j’ai envie d’aller avec
des copines boire des cafés qui durent des heures et prendre des petits dej à
11h qui durent aussi des plombes, j'ai envie d'aller prendre des apéros le vendredi qui finissent à minuit et ou personne n'a mangé en fait sauf un chips ou un biscuit salé, j’ai envie d’inviter 15 amis et faire une
auberge espagnole puis vomir dans l’évier de ma cuisine… J’ai envie de fêter mon
anniversaire et pas avoir l’impression d’être passée de 38 à 41 sans transition…
J’ai envie de rattraper le temps perdu depuis 2018 et sortir de cet interminable
tunnel , j’ai l’impression qu’on nous a coupé les ailes en plein vol. Il y a un
an, tout me semblait possible à nouveau. Aujourd’hui j’ai l’impression d’être
punie… comme tout le monde. Alors oui oui oui à tout, c’est grave, c’est
dangereux, c’est un devoir civique…blablabla. Moi j’en ai juste marre d’obéir
depuis 2 ans et demi, de me comporter comme un bon soldat et d’appliquer des
mesures qui n’ont parfois pas de sens pour moi (et ça marche aussi pour le
guide des règles absolumentimportantesàsuivresinoncesdirectsalle5724hantibios du
parfait parent d’enfant cancéreux). Mais je le fais, voilà, je ferme ma gueule
(pas tout le temps), je retiens ma respiration, j’attends que ça passe (comme le reste) et puis un jour,
on repartira en vacances, on refera la fête, on sera de nouveau insouciants,
notre humeur ne dépendra plus d’un conseil de sécurité, d’un résultat de radio
ou d’irm, d’une prise de sang. Ce jour-là, on aura encore plus de rides et de
cheveux gris, on n’aura pas perdu les sacrés kilos du confinement (qu’on arrête de nous faire chier avec ça non ?), on ne fera pas plus de sport, on n’aura
pas fait plus d’économie… On aura juste l’impression que la vie a filé, qu’on
a manqué des trucs mais qu’il nous reste du temps pour en profiter avant d'aller en maison de repos et de choper un bon petit cancer, enfin j’espère
que ce ne sera pas en 2035…
lundi 26 octobre 2020
joyeux canceriversaire
Ce jour-ci je l'avais rêvé, imaginé, magnifié. J'ai bien longtemps cru qu'il n'arriverait jamais... Deux ans de larmes, de colères bruyantes, sourdes, latentes, deux ans de souffrance, de douleur, deux ans d'espoirs, deux ans d'hôpital, deux ans de mise au ban de la société, deux ans de chimios, deux ans de rdv médicaux immondes, deux ans c'est long, c'est court, deux ans c'est hier, deux ans dans la dèche, deux ans de photos, deux ans de bulle, de confinement avant que cela soit même à la mode, deux d'attente, longue, angoissante, deux ans perdus, deux d'enfance, deux de trentenaire, deux ans de vie, deux ans de salles d'attentes, deux ans de nuit agitées, deux ans de mort, deux ans de cheminement, deux ans de rencontres riches et inestimables, deux ans d'amour autour de nous, deux ans de solidarité, de poids à porter, deux ans de marathon, deux ans d'insomnies, deux ans de cris, deux ans de handicap, deux ans de justification, deux ans de paperasse, de coups de fils, d'explications... deux ans d'AMOUR et de MERDE.
J'avais rêvé ce jour comme de celui où on finit ses études supérieures, où on rend son mémoire et où on se dit "ah... c'était juste ça"
Sans ce jour, on aurait tous crevé et ce jour, on nous le vole. On avait imaginé des paillettes, des confettis, des feux d'artifice, du champagne, trop d'alcool, trop de nicotine, trop de tout, des voyages, des fêtes, des danses, du bruit, beaucoup de bruit, beaucoup de monde, plein plein de monde, des cris, des embrassades sans fin, des larmes de joie, d'émotion , des excès et là...rien... c'était juste ça? Pour nous c'est tellement, pour les autres c'est "juste "ça aussi , un jour comme les autres, passé enferme en télétravail, sans dîner, sans café avec les collègues, sans resto... un jour comme un autre, dans une actualité morose où cette liberté dont on a tant été privé pendant deux ans, l'état, la commune, la province l'école nous en prive. Alors ce jour, comme il y deux ans, on le passera seul, avec nos angoisses, nos larmes, nos stress, nos craintes qui ne cesseront jamais. Ce jour, on nous l'a volé comme on nous a volé deux ans de notre vie . Pourtant on fait les moutons, on a toujours suivi les sacro-saintes règles, parce qu'on a si peu débordé ou à peine outrepassé la loi, parce qu'on s'est dit qu'on l'aurait NOTRE jour de fête et puis non... en fait... c'est encore un jour de merde avec un goût un peu moins merdique que les 365X2 précédents.
Malgré ça, après deux ans, je ne sais toujours pas comment empêcher les commentaires sous les post facebook parce que je n'aurais pas envie d'y répondre, je ne sais toujours pas pourquoi c'est tombé sur notre gueule, je ne sais pas comment on se reconstruit après ça, je ne sais pas pourquoi on a eu la chance d'échapper au pire, je n'ai toujours rien compris. Je suis brisée, un peu plus qu'avant encore et je ne parviens à ramasser tous ces morceaux éparpillés de moi. Plus trop femme, compagne trop lointaine, trop mère , trop prof (à mon goût), mauvaise amie, soeur par intérim, fille indigne.
Je revis toujours cette journée demi-heure par demi-heure, j'ai encore le souvenir des odeurs, des goûts, des sensations, de ma tenue, du temps qu'il faisait, des voix, du bruit des machines, des explications données à la louche , de mon carnet où j'ai tout noté pour ne rien faire de travers, de ce que j'avais prévu de faire après la journée, du bruit de mes pas dans les couloirs. Je me souviens de TOUT, je n'oublierai jamais.
Je pleure encore, souvent , je crie encore, souvent, j'ai envie de tuer tout le monde, souvent, j'ai envie de me tirer d'ici, souvent je ne trouve plus ma place, tout le temps. Alors j'essaie de dormir, je rêver à des meilleurs lendemains, aux voyages, à la vie des autres, à une autre vie. Et parfois mon coeur est tellement sec que je n'ai plus de larmes, juste de la rage, plus d'empathie, plus rien. C'est ce que le cancer a fait de moi , sans le vivre dans mon corps, il m'a gangrénée de l'intérieur, je m'applique à le faire sortir par tous les pores. Oui, j'aspire à des lendemains qui chantent, pour moi, pour nous, pour mes enfants, pour ceux que j'aime.
vendredi 9 octobre 2020
plus de pause
Il n'y a plus de pause, mon dos et mes trapèzes sont aussi durs que des parpaings comme disent les français. Le cours est terminé depuis 15 minutes et je n'ai pas quitté mon bureau, mon ordi, ma chaise... les mails arrivent, les messages sur Teams (des gros pouces, des gros like, des bonshommes qui rigolent, des coeurs quand je dis que le travail est posté sur le bloc-notes ou quand je donne le numéro du local, la différence entre travail à distance et réseaux sociaux, entre privé et professionnel n'existe plus) Il y a aussi les étudiants qui ont l'impression qu'on est potes ou collègues et qu'ils peuvent me demander des comptes: "je m'étonne de me retrouver dans cette classe Teams alors que j'ai validé ce cours l'an dernier" alors, dis moi d'abord dans quelle classe et section tu es gros malin, parce que des Lucas j'en ai 15 et après on verra ce qu'on peut faire, je ne suis pas mentaliste, si t'es en 1re, t'as mon cours vu? comment je peux savoir que tu l'as réussi? ou "je m'étonne de ne toujours pas avoir de nouvelles de mon travail" (et bien c'est peut-être parce que j'en ai 250 à corriger, Coco...), les 25 "madame je suis malaaaatttt je vais me faire tester alors je me mets en quarantaine (enfin 15aine, enfin 7aine, enfin jesaisplus, je suis nulle en math), vous pouvez enregistrer votre cours? Les chats (messagerie) à gérer PENDANT le cours ZOOM parce que "ça ne fonctionne pas", "il me faut le mot de passe pour rentrer dans la réunion" (il n'y en n'a PAS!!!!) et où j'essaie péniblement de parler et garder mon calme avec mes gosses qui rentrent, passent derrière l'écran en croyant être discrets, portes qui claquent, chat qui miaule (le vrai) alors que je suis dans mon bureau. Les conversations de groupe (Madaaaammmmee, vous avez bien reçu mon travail, vous pouvez aller voir? et moi et moi? et moi? JE VOUS AI DIT 10 X QUE QUAND C'EST SUR LE BLOC NOTES, C'EST ENREGISTRE SUR LE BLOC NOTES VU???) Madame, je n'ai vraiment pas réussi à utiliser le bloc-notes, je n'y comprends RIEN (rassure-toi , moi il m'a fallu 5 jours et je suis pas payée en heures supplémentaires) alors je vous l'ai fait sur papier et j'ai pris une photo et je vous l'envoie par mail..." "Maaadammme, vous êtes notre titulaire: on peut vous le dire, ça ne va pas du tout, on a beaucoup trop de travail"
OK, je n'ai plus officiellement 2 enfants, j'en ai 275...
Pas moyen de décrocher de ces écrans. Et quand tu quittes ce qui est lié au boulot c'est pour lire des trucs alarmants, alarmistes, angoissants:
les quartiers populaires de Madrid reconfinés
G L Bouchez: "certains tentent de me viser"
Le nombre des contaminations et hospitalisations continue de grimper
Mise en garde contre les mauvaises interprétations d'autotest
L'école de xxxxx fermée car l'enseignante est testée positive au Covid
Coronavirus : la police prête à sanctionner le non-respect des nouvelles mesures, Les amendes devront être payées (oui merci, il manquait plus qu'ils recommencent ceux-là)
Le petit business du coronavirus
Trump pourrait être réélu
Plus de 1700 cas enregistrés aujourd'hui